Désolé pour la petite attente ! Et bonnes fêtes de fin d'année si je ne poste pas d'ici là !! =D
-II-
Ambulances.
Urgentistes. Blouses blanches. Non. C'est ce qui m'avait frappé.
Blouses jaunes. Blouses anti radiations. Celles que l'on ne voit qu'à
la télé lorsqu'il y a une explosion ou tout autre incident
nucléaire. Il nous emportaient comme des bêtes. Comme des cobayes à
qui l'on allait faire des expériences toutes plus folles les unes
que les autres. Mais non. Ce fut mon imagination qui dérailla encore
une fois. On nous envoyait juste dans l'hôpital le plus proche, mais
avec beaucoup de précautions. Paul était affolé. Moi j'étais en
colère. Je déteste les surprises. Celle-ci en était une de taille.
Nous étions tous dans l'ambulance. La sirène hurlait comme une
truie que l'on égorge. Je regardais les autres. Il étaient
paniqués, autant, si ce n'est plus que Paul. Paul me prit la main.
Si cela pouvait le rassurer. Il me caressa la joue. Je lui lançai un
regard piquant. Il ne me retoucha plus joue. Il ne m'avait même pas
payé de consommation. S'il croyait qu'un simple surprise, une
détestable surprise, pouvait me faire plaisir, ce minable se
trompait. Une petite fille sanglotait. Pourquoi avait-elle été voir
Arianna chanter ? Elle avait dû s'emmerder. On arriva enfin à
l'hôpital. On nous plaça tous en quarantaine. Nous étions une
quarantaine en quarantaine. Je souri lorsque j'entendis ma conscience
formuler de telles stupidités, à un tel moment. Un homme me regarda
avec un air de colère et de haine, il me lança, enragé :
« Tout a l'heure
vous criiez ? Maintenant vous souriez ? C'est de votre
faute tout ça hein ? C'est de votre faute ? Vous vous
foutez de notre gueule c'est ça ! C'est des foutaises !
Une mascarade ! Écoutez-moi tous ! C'est elle
l'organisatrice de cette connerie ! C'est une grosse blague !
Une caméra cachée !
-Enfin, calmez-vous
Monsieur, vous voyez bien que cette dame n'y est pour rien, je vous
rappelle que les hôpitaux n'auraient pas accepté une telle blague
dans leur établissement, lui répondit une femme, la soixantaine.
-Ta gueule la vieille !
J'en ai marre d'être ici ! »
L'homme hurla et cogna
à la porte. Des médecins entrèrent et le piquèrent immédiatement,
comme un animal trop virulent. L'homme tomba lourdement au sol. Les
médecins ressortirent, comme pour éviter un mal invisible. Je
soupirai bruyamment. Rien ne se passait. Encore ce mot. Il nous
suivait toute notre vie. Enfin, une cohorte d'infirmières entrèrent,
toujours en blouses jaunes, et nous firent passer des examens. Après
plusieurs longues heures, personne n'eut le droit de partir. Ils
évacuèrent une aile entière de l'hôpital pour nous séparer tous,
un dans chaque chambre. Ils disaient que c'était au cas où ou un
seul d'entre nous avait la maladie.
« Quelle
maladie ?, a demandé l'un d'entre nous. »
Ils nous ont répondu
que la chanteuse avait contracté une maladie. Une maladie encore
inconnue à notre époque. Les gens furent encore plus paniqués.
Paul respirait rapidement, tumultueusement. On nous sépara donc. Je
fus installée dans une petite chambre assez sympathique. Une
télévision, une radio, des livres. Je ne savais pas si nous étions
dans un hôpital de luxe mais nous étions bien lotis. Je m'allongeai
sur le lit et m'endormit instantanément.
En me réveillant,
j'allumai la télévision :
« La Lapizodia ou
plus communément appelée maladie de la pierre, est une étrange
maladie qui est apparue il y a quelques jours dans plusieurs pays du
monde. Nous n'en savons pas grand chose si ce n'est que les individus
touchés meurent par pétrification au terme de leur maladie. Les
médecins et scientifiques du monde entier se sont penchés sur cette
nouvelle maladie et trouveront dans très peu de temps la solution à
ce problème. »
Je regardai ma peau
très attentivement. J'observai chaque recoin de mon corps devant le
miroir. Elle était rosée, mais pas grise. J'attendis, longtemps.
Enfin, on vint à ma rencontre. On me dit que je pouvais quitter
l'hôpital, que je n'avais rien. Par contre, je ne pouvais pas
rentrer chez moi avec celui qui m'accompagnait, il avait contracté
la maladie. Je leur décrochait un regard interrogateur et arquai un
sourcil. Il me répétèrent ce qu'ils avaient dit. Je lâchai un
petit rire. Ils furent interloqués. Je leur répondit, du tac au
tac :
« Je ne suis pas
avec lui. C'est lui qui est avec moi. »
Ils ne comprenaient
toujours pas. Décidément, ces esprits scientifiques... Que
d'intelligence cloisonnée et bornée.
« Je suis une
pute. C'est lui qui est avec moi. Ce n'est qu'un pauvre type qui n'a
pas assez de charisme pour se trouver quelqu'un, alors il me paie des
fortunes parce qu'il croie que je l'aime. Maintenant, j'aimerai bien
que vous lui demandiez mon argent. Qu'il crève, j'ai d'autres
clients, et ils me paient bien plus cher que ce minable. »
Une infirmière mit une
main à sa bouche, outrée. Je lui rendis un sourire et lui fit un
clin d’œil. Elle tourna la dos, comme tout le reste des
ambassadeurs de l'hôpital. L'infirmière revint quelques minutes
plus tard avec mille euros en liquide. Elle regardait l'argent avec
envie :
« Et ouais. Je
fais un beau métier. »
Je traversai le
couloir. Je m'arrêtai devant la chambre qui devait être celle de
Paul. Une fenêtre me permettait de voir clairement ce qu'il s'y
déroulait. Il avait lui aussi cette peau grisâtre. Ses yeux avaient
perdus de leur éclat. Il était encore plus laid qu'avant. Son seul
charisme qui résidait dans ses yeux, avait disparu en fumée. Il
chercha la télécommande et appela une infirmière, elle me bouscula
pour entrer dans la chambre.
Avec sa combinaison
spatiale, l'infirmière conduisit Paul dans la salle de bain. Je
compris. Les yeux gris, c'était le premier signe de cette maladie.
Avant de mourir, on devenait aveugle. C'était pour cette raison
qu'Arianna ne faisait que des pas hésitants et avait été conduite
par un garde du corps jusqu'à son micro. C'était pour cette raison
qu'elle avait caché son visage avec cette voilette. Pour cette
raison que les lumières étaient si fortes, pour cacher son teint
gris. Malgré tous ces charmes, ces artifices, la Mort avait tout
emporté. Le Rien avait tout avalé. Il ne restait plus rien de cette
Diva, mis à part quelques morceaux de pierre, et le mérite d'avoir
été la première à avoir contracté cette maladie en France. Je
sortis de l'hôpital, respirant enfin l'air frais et me débarrassant
de cet atmosphère aseptisée. Je traversai ce quartier de bobos en
profitant des arbres et des beaux appartements. L'air frais et
printanier fut revigorant. Moi et mes mille euros en poche, je
retournai dans mon cher quartier du 13ème arrondissement. Je montai
les escaliers qui hurlaient de douleur à chaque pas posé sur ses
marches. J’ouvris la porte en bois mité et m'allongeai sur un
futon moelleux. J'étais originaire du Japon. J'avais gardé mes
habitudes de là-bas. J'allumai le télévision et me fit chauffer un
thé :
« La Lapizodia
touche de plus en plus de personnes. Le monde entier est à présent
touché par cette maladie ravageuse. L'ONS et les gouvernements
mondiaux conseillent au population de rester chez elle, sauf pour
faire les courses indispensables. Le gouvernement Parti Solidaire
Français vient de créer une aide pour la population française.
Cette aide vise à créer des congés payés, jusqu'à ce que la
maladie disparaisse. Le gouvernement, déjà endetté, continue à
creuser son déficit avec cette aide. Les critiques du parti adverse
fusent. »
La bouilloire cria à
tu-tête. D'un pas, je passai de ma chambre à la cuisine. Je me
servis mon thé vert et continuai à écouter les informations :
ce sujet me passionnait. Pour une fois que le monde était touché
par quelque chose d’intéressant. Pour une fois qu'une catastrophe
n'était pas raciste. Qu'elle touchait toutes les populations :
«Des milliers de morts
sont déjà recensés et cela ne devrait pas s'arranger avec le
temps. Les scientifiques cherchent toujours activement une solution.
Même les médecins pour la recherche contre le cancer et la VIH sont
intervenus pour aider à contrer cette épidémie. Si jamais votre
vue baisse subitement et que votre peau devient grise, rendez-vous
immédiatement à l'hôpital, ne touchez, ne parlez, ne rentrez en
contact avec personne. Les hôpitaux son déjà pris d'assaut mais
les autorités affirment que tout le monde sera pris en charge. »
J'éteignis cette boîte
à images. J'allumai ma chaîne-hi fi. « These boots are made
for walking » résonna dans mon appartement minuscule. Je
décidai d'aller faire une petite promenade. Je mis la même musique
sur mon Ipod en marchai dans ma rue. Celle-ci était déserte.
D'habitude pleine de vendeurs à la sauvette criant le mérite de
leur produits, le silence était complet, mis à part ma musique. Je
sautillai et tournoyai autour de chaque lampadaire qui se présentait
devant moi. Je hurlai ma chanson lorsqu'une personne me bloqua la
route. Je lui criai de bouger. Elle ne bougea pas. Je lui donna une
gifle monumentale. Ma main fut recouverte d'éclats de pierre. Je fis
un bond en arrière, comme si j'avais crû que la maladie m'avait
attrapée. Les pierres n'était plus contagieuses. Quelle stupide
frayeur. Je continuai mon chemin quelques pas... Je me retournai. Je
poussa la statue sur la route. Elle se brisa. Je me mis à danser sur
Nancy Sinatra. Je frappai des mains, complètement emportée par la
musique. Je finis ma chanson en tournoyant sur moi-même. Terminée.
Je retournai chez moi. Il n'était que midi. Que faire quand on
devait rester chez soi et que personne ne nous accueillait si l'on
sortait ? Je décidai de faire comme toujours. Je sortis et
marchai sur le trottoir, sans but... Mon job, en somme. Comme je
l'avait prédit, personne ne vint. J'errai alors. Il n'y avait que ça
à faire. Maintenant je sais que j'aurai du secourir et aider des
gens. Mais je n'y prêtai pas attention. Je fis ensuite une étrange
découverte. Une adolescente était assise sur un banc, sanglotant.
Je m'assis à côté d'elle. Je mis ma main sur son dos, subitement
compatissante. Elle me regarda, implorante et me pointa son doigt
sous le banc. Je me mis à quatre pattes et jeta un regard sous le
banc. Un chat y était pétrifié.
« Où sont tes
parents ?
-Morts.
-C'est ton chat ?
-Il l'était.
-Où vis-tu ?
-Je ne vis plus.
-Comment ça ?
-Je vais mourir.
-Pourquoi dis-tu ça ?
-Mes parents sont
morts. Je vais attraper la maladie.
-La Lapizodia ?
-La Lapizodia.
-Tu veux venir chez
moi ? Dans mon appartement ?
-Tu n'as pas peur
d’attraper la maladie ?
-Non.
-Tu travailles ?
-Oui.
-Le gouvernement doit
te payer alors.
-Non.
-Pourquoi ?
-J'étais prostitué.
Comment sais-tu que le gouvernement paie les gens ? Tu n'es
qu'une adolescente.
-Je m'intéresse à la
politique.
-Pourquoi ?
-Parce que j'admire la
politique.
-Tu admires ce ramassis
d'incapables ?
-De la part d'une pute,
je pense que ce n'est pas approprié.
-Bien. Tu as du
répondant. Que faisais ta mère ?
-Ma mère était femme
au foyer.
-Autant dire soumise.
Et ton père ?
-Président.
-Président de quoi ?
D'une entreprise ?
-Non. Président de la
République Française.
-Ah ha ! Tu as de
l'humour !
-Je suis Blanche
Assort. Fille d'anciennement François Assort, l'ancien chef du Parti
Populaire, l'ancien Président de la République Française.
-Non... Tu ne rigoles
vraiment pas ?
-Je ne rigole plus
depuis que mes parents sont morts.
-Le... Le Président
est mort ?
-Ça ne sert à rien de
pleurer. Le gouvernement ne pourra rien faire contre la maladie. Que
ce soit mon père, Hitler, Staline ou mère Térésa à sa tête,
rien n'y fera. Cette maladie est trop forte pour le genre humain. On
ne pourra rien faire. Rien. »
Rien... Cette petite me
plaisait. Je lui pris la main. Elle la relâcha. J'oubliai. C'était
une adolescente.
« Viens.
-D'accord. »
Elle me suivit
docilement. Quand j'y repense, j'aurai pu lui dire que j'habitais
dans les égouts, elle m'aurait suivi de toute façon. Je la
conduisit jusqu'à mon appartement. Elle s'allongea dans le lit et
s'endormit. Je soupirai. Qu'est-ce qu'il m'avait pris de l'inviter...
J'avais laisser un homme qui me payait crever dans un hôpital,
j'avais poussé une statue pour la briser et j'invitai cette gosse.
Je levai les yeux au
ciel puis je regardai par la fenêtre. Il faisait déjà nuit. Le
temps passait vite quand une épidémie touchait la planète. Je
m'assis sur une chaise et m'endormit.
Je me réveillai au
sol. J'avais du tomber de ma chaise. La gamine était toujours
allongée sur son lit. Je la touchai. Elle n'était pas en pierre. Je
me servis un thé, prit quelque chose à manger et l'avalai sur le
balcon. Je sortis mon téléphone et appelai un de mes clients, un
des plus riches.
« Allô ?
Cyril ?
-...
-Répond Cyril, c'est
moi. Si ta femme est à côté dit une connerie.
-Elle n'est plus là.
Elle ne le sera plus.
-Quoi ? Parle
français !
-Elle est morte...
Morte...
-Tu veux que je
vienne ?
-Vite. Je vais y
passer. »
Je raccrochai et me
précipitai en dehors de l'appartement. Je dois avouer qu'à ce
moment, j'avais complètement oublié la fille. Je courus à travers
les rues désertes de Paris. Je croisai deux ou trois fous qui
étaient dehors, comme moi. Ce qui me frappai le plus, ce fut les
statues. Paris était la ville au Musées. Elle portait bien son nom.
Quelques rares statues étaient debout. Les autres était toutes
allongées au sol, recroquevillées sur elle-même, comme des larves.
Mais elles étaient des milliers. Toutes avaient un point commun.
Elle s'effritaient. Apparemment, le corps humain se décomposait
encore plus rapidement après avoir subi cette maladie que lors d'une
mort « normale ». Je courus pendant plus d'une heure.
Enfin, je fus, à bout de souffle, à la porte d'un immeuble
luxueux, sur les Champs. On m'ouvrit immédiatement. Je dévalai les
marches. Cyril était allongé sur son King Size. Il tenait la main
de sa femme, tuée par la maladie. Elle commençait à s'effriter
sous la pression de sa force et l'homme pleurait à chaudes larmes.
Il avait un teint de granit et ses yeux étaient déjà gris.
« Ne reste pas
là ! Va te soigner !
-Non. On ne peut pas se
soigner. Prend ce que tu veux. Tu es tout ce qu'il me reste.
-Ne reste pas ici !
Va-t-en ! C'est malsain !
-C'est à toi de
partir, prend ce que tu veux et dégage ! Je voulais juste voir
quelqu'un de vivant avant de... »
Cyril fut pris d'une
toux abominable. Il cracha du sang. Il se tordit sur son lit, lâcha
la main de sa femme qui partit en poussière, et hurla. En un instant
son corps se figea.